En prélude à la Journée mondiale sans tabac (JMST) célébrée chaque 31 mai, un atelier de sensibilisation des médias s’est tenu au Centre La Vie, à l’hôpital central de Yaoundé, le vendredi 30 mai 2025. Cet atelier, organisé par le ministère de la Santé publique en collaboration avec le Réseau des médias africains pour la promotion de la santé et de l'environnement( REMAPSEN), visait à renforcer les capacités des professionnels de la communication et à mettre à nu les stratégies insidieuses de l’industrie du tabac, qui cible principalement les jeunes.
Le thème de l’édition 2025, « Produits du tabac et à base de nicotine : démasquons les tactiques de séduction de l’industrie du tabac », appelle à une prise de conscience collective face à la sophistication des méthodes de marketing utilisées pour banaliser, voire valoriser, l’usage du tabac.
Le Dr Marileine Kemme, médecin addictologue et experte en réduction des risques et dommages liés à l’usage des drogues, a livré une analyse sans détour :
« Les journées portes ouvertes sont un levier puissant pour rapprocher la population des acteurs de prévention. Elles permettent non seulement de sensibiliser sur les dangers du tabac, mais aussi de déconstruire les mythes qui entourent sa consommation, et de promouvoir des modes de vie plus sains.
Cette approche participative permet d’impliquer les jeunes – première cible de l’industrie du tabac –, mais aussi les familles, les éducateurs, et les leaders communautaires, dans une riposte coordonnée. Elle renforce aussi les partenariats entre secteurs public, privé et société civile.
Les médias, en particulier, sont au cœur du dispositif : ce sont des acteurs clés dans la diffusion des messages de santé publique, grâce à leur capacité à vulgariser l’information à travers la radio, la télévision, la presse écrite ou les réseaux sociaux.
Ils jouent un rôle décisif pour déconstruire les fausses croyances promues par la publicité, et mettre en lumière des figures inspirantes, comme des anciens fumeurs ou des experts en santé.
Au Cameroun, les médias communautaires, les blogueurs et influenceurs, ou encore les radios de proximité sont des canaux stratégiques, notamment auprès des jeunes et des populations vulnérables.
Cette année, deux partenaires majeurs – CAMTEL et le REMAPSEN – nous accompagnent dans cette dynamique. Ces réseaux puissants de professionnels des médias vont contribuer à amplifier la portée de la campagne anti-tabac, avec des messages adaptés aux réalités locales, et à élargir le public touché.
Au-delà du 31 mai, il faut engager une politique durable, intégrée et participative, pour faire reculer durablement la consommation de tabac et de nicotine. »
Des tactiques trompeuses mises en lumière
Lors de l’atelier, plusieurs tactiques dilatoires de l’industrie du tabac ont été présentées aux participants, illustrant le niveau de sophistication et de manipulation marketing employé. Parmi elles : le recours à des arômes attractifs pour masquer le goût du tabac : fruits, vanille, menthe… ; des emballages colorés et designs qui rappellent des produits alimentaires ou cosmétiques, pour tromper le consommateur ; l’utilisation d’influenceurs et de contenus sponsorisés, notamment sur TikTok ou Instagram, pour rendre les produits « cool » ou inoffensifs ; des campagnes pseudo-scientifiques insinuant que certaines formes de tabac seraient moins dangereuses que d’autres ; le lobbying exercé sur les décideurs pour empêcher l’adoption de mesures fortes, comme la taxation, l’interdiction de la publicité ou la réglementation stricte de la vente.
Ces révélations montrent à quel point l’industrie du tabac reste active et inventive dans sa communication, malgré les preuves accablantes de la nocivité de ses produits. Elles rappellent également l’urgence d’une mobilisation multisectorielle, dans laquelle les médias ont un rôle stratégique à jouer pour protéger les générations futures.